Depuis plusieurs jours, des roquettes du Hamas
pleuvent sur Israël. Pour nous, les nouveaux immigrants c’est l’occasion de se
confronter à une dure réalité. Dès que ça sonne, direction l’abri (pièce dans
l’appartement pour les plus chanceux, ou au sous-sol de l’immeuble pour les
autres). Là, il faut attendre 10 minutes et si la sirène ne retentit pas de
nouveau on peut regagner son appartement. Ma fille a 6 ans et demi. La première
fois qu’on s’est retrouvé au miklat, j’ai eu l’impression de voir mon PC
bugger. Pour moi, et même si j’ai la sensation que c’est devenu pour elle une
routine de se diriger vers l’abri, c’est toujours aussi difficile de ne pas
pouvoir trouver les mots pour apaiser son angoisse. C’est pourquoi j’ai décidé d'interroger Sandrine Djian, psychologue-clinicienne, maman,
installée en Israël depuis de nombreuses années.
Comment
peut-on expliquer la situation actuelle aux enfants ?
Sandrine DJIAN : Tout dépend de l’âge de l’enfant. Même un enfant en
bas âge que vous prenez dans les bras pour aller vers le miklat comprend qu’il
se passe quelque chose d’anormal. Il est inutile de mentir, de parler
d’exercice. Il faut dire la vérité.
Peut-on
parler de "guerre" ?
Sandrine DJIAN : Oui. Encore faut-il expliquer ce qu’est une guerre.
L’explication peut-être compliquée. Il faut dire les choses simplement. « Il y a des gens qui veulent nous faire du
mal. Et quand il y a la sirène, on va au Miklat pour se mettre à l’abri ».
Il est important de sécuriser l'enfant. En aucun cas, il ne faut se lancer dans
la détestation et la démonisation des arabes. Mais finalement, je reste
convaincu que ce qui prime c’est l’attitude des parents. Si au moment de
l’alerte une mère s’affole, ses enfants seront affolés. Vous avez le droit
d’être angoissée, vous pouvez même le verbaliser. Il est important je pense de
dire ici qu'un parent angoissé peut l'exprimer et permettra ainsi à son enfant
d'élaborer ses propres peurs. En tant que parents, au moment de l’alerte,
l’important est que votre attitude soit en accord avec votre ressenti. Si vous
êtes tout sourire en répétant en boucle « tout va bien, tour va
bien », votre enfant va sentir l’angoisse. Je trouve que cette phrase
n'est pas claire. Si le parent est tout sourire alors qu'en fait il panique, l'enfant
sera dans la confusion qui peut à son tour susciter de l'angoisse.
Je pense aux
olims de France qui viennent d’arriver en Israël. Doit-on parler de la même
façon à son enfant quand on vit dans une ville du sud qu’un enfant qui vit à
Raanana par exemple, moins soumis aux alertes ?
Sandrine DJIAN : Encore une fois tout dépend de l’âge de l’enfant.
De sa maturité affective et intellectuelle. Parfois la première peut compenser
la seconde parfois les deux sont insuffisants. Quand un enfant descend 10 fois
par jour au Miklat, il faut le rassurer. On peut par exemple lui montrer une
carte du pays pour lui expliquer la récurrence des alertes.
J'entends partout que regarder les
informations devant les enfants est déconseillé...
Sandrine DJIAN : Là aussi cela dépend de l’âge de l’enfant.
Personnellement, de façon générale, je pense qu’en dessous de 10-11 ans, il est
proscrit que les enfants regardent le journal télévisé. C’est d’autant plus
valable dans ce genre de situation. Il est préférable d’écouter la radio car
les images peuvent être très violentes pour les enfants. Ce qu’il faut bien
comprendre c’est que si votre enfant regarde des images de ce qui se passe à
gaza, il n’a pas les outils pour faire face à la dureté des images et aux
propos qui y sont exposés. il n'est sûr qu'il fasse la différence entre son lieux de vie et le lieu des affrontements qu'ils voient à la télé. Ceci ressemble plus a un film d'horreurs tout aussi
néfaste pour les petits. Cette incompréhension peut générer des angoisses. Même
après 11-12 ans, je trouve nécessaire de les accompagner, leur expliquer.
Beaucoup
d’enfants olims hadachims sont actuellement en France pour rendre visite à
leurs familles. Leurs parents doivent-ils leur expliquer la situation ?
Sandrine DJIAN : Il est inutile de le faire pour les enfants en bas
âge. Maintenant, quelques jours avant le retour en Israël, si la situation
persiste on doit leur expliquer "tu sais en ce moment en Israël, il se passe ceci". Il ne faut oublier que dans les
écoles et les ganims tous les enfants
israéliens ont fait un exercice de sécurité.
Justement au
gan, dans les écoles, les maitresses évoquent l’actualité. Quand les trois
adolescents Eyal, Guilad et Naftali ont été enlevés, elles ont expliqué la
situation aux enfants. Ne sont-ils pas trop petits ?
Sandrine DJIAN : Bien sûr. Quand la famille Fogel a été assassinée à
Itamar, je travaillais dans une école et j’avais demandé à ce qu’on n’en parle
pas à la Kita Alef (équivalent De la classe de CP) car j’estimais que c’était
trop difficile. En tant que parents, on se doit de s’informer de ce que les
maitresses disent aux enfants. Et plus important, on se doit de vérifier ce
qu’ils ont compris et ressenti. Mais malheureusement je crois qu’il est illusoire
de vouloir préserver les enfants de cette violence. On ne peut pas hermétiser
ses enfants de la réalité du pays.
Depuis 2001, plus de 14800 roquettes et obus de
mortier ont été tirés depuis Gaza sur Israël et plus de 9000 depuis le retrait
israélien de la bande de Gaza en 2005. Ce sont donc 3 roquettes par jour en
moyenne qui ont été tirés ces 12 dernières années, mettant ainsi en danger la
vie de 3,5 millions de civils israéliens au sud du pays. (site Tsahal)
Pour les enfants je conseille de regarder cette vidéo, bien faite, courte et dans un hébreu que même moi je comprends c'est vous dire.....
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