Chaque soir, veille de classe pour Anouk,
c’est-à-dire 6 jours sur 7, c’est la même angoisse, la même question
lancinante : qu’est ce que je vais bien pouvoir lui préparer pour demain
midi ?
En Israël, donc, pas de cantine. Les parents
préparent le repas. Au-delà du fait que l’absence de cantine prive les
enfants de perdre leur audition au réfectoire et du plaisir de boire dans des
verres Duralex en se demandant qui est le plus grand, l’absence de cantine
devient une patate chaude qu’on refile aux parents qui, dans mon cas et je ne
suis pas la seule, ont bien d’autres choses à faire le soir.
Soyons clairs, avant de poursuivre et pour éviter
les remarques du genre « un repas équilibré c’est pas compliqué à
préparer », ma fille mange mal. Elle n’aime pas les légumes, n’est pas une
fan de fruits et quand elle voit une carotte, elle se dit « oh c’est
rigolo c’est quoi ce truc ? ». je plaide coupable je suis en partie
responsable de ce constat et D. m’a puni car depuis 2 semaines aujourd’hui je
paye cher mon laxisme alimentaire.
« C’est à toi de lui préparer le repas ».
L’employée de la mairie m’avait prévenue. J’avais fait le plein de courses.
J’étais gonflée à bloc, prête sur la ligne du départ, certaine de ma réussite,
me répétant en boucle « C’est hyper simple, ca va aller ».
Retour à la maison après la première journée au gan,
je récupère le sac à dos. Ce qui le matin même était bien rangé - sandwich, fruit, boisson, paquet de chips –
est à peine entamé. La banane ouverte à collé dans le fond, le paquet de chips
est renversé, la bouteille mal fermée etc… bref c’est plus un sac à dos c’est
la Yougoslavie après le passage de Milosevic.
Je me décourage pas, je me dis, « on va
trouver ». Je repars faire les courses, Anouk dans le chariot. Elle se fie
aux emballages, je regarde même plus les prix. Je me jette sur des babybels
dont le prix est indécens, on tente des galettes de riz, des crakers etc…
Le lendemain, j’y crois encore. Je me lève à pas
d’heure pour préparer le sac en question dont les motifs de princesses semblent
me murmurer tous les matins « C’est peine perdue, elle n’avalera jamais
ca ». Nouvel échec. La petite ne mange rien. Au bout de 3 jours, une
petite israélienne me demande à la sortie « Hefo Babybel ? » (Où
sont les babybels ?) et là je
comprends qu’on peut avoir 5 ans et demi et soudoyer l’amitié contre de la
nourriture.
Donc je résume, elle ne mange rien, résultat je
multiplie les achats pour … rien. En plus, pour ne rien arranger, la maitresse
m’ôte chaque jour les rares denrées alimentaires acceptées par qui vous savez. « Pas
de viande », « Pas de bambas, y a une petite qui est
allergique », « Pas de chips c’est mauvais pour la santé ».
Résultat c’est plus un repas c’est une épreuve de Top Chef.
En dehors de tout ça, je ne sais toujours pas quand
préparer ce fameux repas. Là, deux écoles s’affrontent, les filles organisées
qui font tout la veille au soir. Les autres comme moi, flemmardes qui le
matin font ça à la va-vite. entre le café et le rangement de la vaisselle de la veille, la gerbe en plus.
Alors voilà toi qui est en France et qui demain va,
sur les coups de 18H te demander, « mais qu’est ce que je vais bien leur
faire à manger ? », pense à moi, et à mes copines d’alyah, qui nous
posons la question … deux fois par jour. L’an dernier, je pestais contre le
prix de la cantine. Aujourd’hui, je serais prête à payer le double sans rechigner.
peut-être qu'Anouk n'a pas tout à fait réalisé qu'elle aussi a fait son Alyah ?... William RAMET
RépondreSupprimer